À propos de cette revue
Passerelles SHS est une revue pluridisciplinaire animée par les doctorant•e•s de l’École Doctorale Sociétés, Temps, Territoirs (STT) et de l’École Doctorale Espaces, Sociétés, Civilisations (ESC). Elle met à l’honneur les nombreuses passerelles qui se tissent entre les disciplines à travers les approches pluridisciplinaires en sciences humaines et sociales. La revue Passerelles SHS constitue un espace de réflexion ouvert sur les pratiques et les méthodes de ces démarches scientifiques.
Numéro à venir - 2026 - La frontière dans tous ses états : regards pluridisciplinaires
Les frontières sont d’abord étudiées par les sciences humaines et sociales comme des phénomènes géographiques et physiques. Plus récemment, du fait de « l’évolution des techniques de transport et de communication, la dynamique et l’ampleur des échanges économiques, mais aussi la prise en considération politique d’une plus grande interdépendance du système-monde », le renouvellement de cette notion est devenu nécessaire. Considérée aujourd’hui comme un objet d’étude aux multiples facettes et sujette à des évolutions constantes, la frontière peut être tout autant inscrite dans l’espace que symbolique ou sociale, objectivement tracée qu’une métaphore subjective de l’espace social.
La métaphore des « lignes dans le sable » (Parker, Vaughan-Williams, 2009) présente la frontière comme une construction humaine mouvante, en opposition à l’idée d’une ligne fixe et immuable. Cette expression tire son origine de traductions scripturaires divergentes : certains évoquent le sable, d’autres la terre. Cette ambiguïté reflète la tension entre des frontières perçues d’abord comme changeantes et souples puis conçues comme des limites plus rigides.
Les frontières sont d’abord étudiées par les sciences humaines et sociales comme des phénomènes géographiques et physiques. Plus récemment, du fait de « l’évolution des techniques de transport et de communication, la dynamique et l’ampleur des échanges économiques, mais aussi la prise en considération politique d’une plus grande interdépendance du système-monde » (Groupe Frontière, 2024), le renouvellement de cette notion est devenu nécessaire. Considérée aujourd’hui comme un objet d’étude aux multiples facettes et sujette à des évolutions constantes, la frontière peut être tout autant inscrite dans l’espace que symbolique ou sociale, objectivement tracée qu’une métaphore subjective de l’espace social.
Dans un article publié récemment sur le site Géoconfluences (Acloque, 2022), le terme de frontière est défini au sens large : « la frontière peut être définie comme toute discontinuité entre deux formes différentes d’appropriation territoriale, y compris à l’intérieur d’un État. C’est le sens du mot frontier en anglais[1] ». La notion anglaise de frontier a été théorisée pour la première fois par Frederick Jackson Turner en 1893, le terme peut se traduire en français par « front pionnier ». Le terme frontier désigne alors le « front pionnier de la conquête de l’Ouest américain et modèle de la construction du territoire des États-Unis. »[2] La frontière est un espace habité par des populations autochtones mais inhabité d’un point de vue conceptuel. Elle est dès lors envisagée comme un processus historique civilisationnel de colonisation / décolonisation. Il faut nécessairement comprendre une frontière comme étant le produit des sociétés humaines, elle n’est donc pas « naturelle ». La frontière, conçue non seulement comme une séparation dans l’espace mais surtout comme une production des sociétés humaines, est alors un objet d’étude pour les sciences humaines et sociales.
En effet, d’autres concepts émergent, notamment au sein des sciences sociales : ceux de boundaries / borders. À ce titre, Michèle Lamont et Virág Molnár dans un article daté (2002) mais toujours d’actualité intitulé « The Study of Boundaries in the Social Sciences » – référence principale en épistémologie sur les frontières symboliques et sociales – font un état de l’art autour du concept de boundaries. Ils soulignent ainsi l’intérêt du concept de frontière qui permet d’étudier des phénomènes sociaux divers. Les frontières font en effet partie, d’après les auteurs, de la « conceptual tool-kit » (boîte à outils conceptuelle) des chercheurs et chercheuses en sciences sociales et ce déjà depuis les travaux du sociologue français Émile Durkheim (1858-1917). Les auteurs donnent également une importance particulière au rôle des ressources symboliques dans la création, le maintien, la contestation et la dissolution des différences institutionnalisées (classe, genre, race, inégalités territoriales). Deux définitions sont donc proposées : « Les frontières symboliques sont des distinctions conceptuelles établies par les acteurs sociaux pour catégoriser les objets, les personnes, les pratiques, voire le temps et l’espace. […] Les frontières sociales sont des formes objectivées de différences sociales qui se manifestent par un accès inégal et une répartition inégale des ressources (matérielles et non matérielles) et des opportunités sociales » (Lamont, Molnár, 2002).
Le prochain numéro de la revue Passerelles SHS s’intéresse à la frontière comme objet d’étude dont les dimensions / manifestations sont plurielles : sociales, symboliques, etc. Les contributions sélectionnées pourront développer, entre autres, une réflexion autour du processus de frontiérisation (bordering) (Cuttitta, 2015 ; Van Houtum, Van Naeressen, 2002) qui marque une vraie rupture dans l’approche sur les frontières géopolitiques car l’analyse se concentre sur les rapports sociaux à l’œuvre dans la production, la négociation et le maintien de la frontière. Ce processus de construction d’une frontière, qu’elle soit inscrite dans l’espace (?), sociale ou symbolique, pose la question du (dé)passement des frontières, à la fois « passer » concrètement les frontières et « dépasser » symboliquement, subjectivement, la notion de frontière et donc revenir sur la perméabilité et la rigidité des frontières (passages d’une classe sociale à une autre, franchissement des frontières étatiques, etc.). Enfin, cette réflexion concernant la construction des frontières peut également se transformer en processus de déconstruction, de contestation des frontières.
Les articles pourront en outre aborder les thématiques suivantes : les frontières spatiales ; les frontières d’identité sociale et collective ; celle liées aux inégalités de classe, de race, de genre et de sexualité ou encore celles qui séparent validité et handicap ; les frontières disciplinaires (sciences, connaissances) et de professions ; les frontières communautaires, identitaires, civilisationnelles ; les frontières entre les espaces religieux, etc. L’objectif de ce numéro est de mettre en évidence les multiples interactions entre frontières symboliques et sociales, les propriétés de ces frontières (perméabilité, durabilité, etc.) et leur contestation.
(Re)construire les frontières
Un premier axe dans lequel peuvent s’inscrire les communications interroge la construction des frontières. La philosophie, l’histoire et l’anthropologie considèrent l’instauration de la frontière comme un acte fondateur des sociétés humaines. L’idée se trouve au cœur de la réflexion de Cornelius Castoriadis (2006) qui affirme que toute société s’institue en créant son propre monde et en le façonnant comme « son » monde. Les grandes dichotomies « sacré / profane » (Eliade, 2010), « humain / non-humain » (Latour, 1997) ou « nature / culture » (Descola, 2015) semblent témoigner d’une mise en ordre du monde, partagée par les sociétés anciennes et contemporaines. La délimitation des territoires géographiques et des espaces sociaux soumis à une autorité, la production et la catégorisation du savoir renforcées par des dispositifs de pouvoir (Foucault, 1966), peuvent ainsi apparaître comme des éléments fondamentaux d’un processus de « frontiérisation » (Van Houtum, Van Naerssen, 2002). Les distinctions fondamentales exprimant l’ordre et l’altérité, la similitude et la différence, le « dedans » et le « dehors » en sont des manifestations.
Ainsi, pour les sciences sociales, les frontières ne se limitent pas à leur dimension géographique. Produits d’une histoire faite de dynamiques sociales et politiques, elles sont aussi symboliques.
Les frontières internes et externes des sociétés médiévales (Société des historiens médiévistes de l’Enseignement supérieur public, 2021), les marqueurs symboliques séparant l’Ancien et le Nouveau Monde (Vidal, 2021), ainsi que la dualité « maître / esclave » propre à l’impérialisme ou celle de « colon / indigène » inhérente à période coloniale (Mbembe, 2013 ; 2015), illustrent le caractère évolutif et multidimensionnel des frontières.
En outre, la seconde moitié du XXe siècle a été le théâtre d’importantes mutations à l’origine d’une reconfiguration des frontières. L’affirmation de l’idéologie néolibérale, les avancées technologiques dans les transports et l’essor du numérique ont remis en question l’ordre des États-nations hérité de la modernité et de l’histoire coloniale. Ce phénomène, qualifié de « seconde mondialisation » (Michalet, 2005), a vu émerger de nouveaux acteurs capables de s’affranchir des contingentements nationaux, tels que les firmes multinationales, les ONG internationales ou encore les communautés transnationales. Cette dynamique n’a cependant pas entraîné la disparition annoncée des territoires (Badie, 2013). Au contraire, on observe des processus de recomposition des frontières, tant spatiales que sociales. Les « gated communities », les dynamiques de gentrification urbaine, l’affirmation des identités linguistiques et ethnoculturelles, ou encore la formation de blocs économiques comme les BRICS témoignent de cette évolution. Également, le renforcement des zones de contrôle frontaliers par les États, leur extension à des espaces extranationaux ou encore les initiatives de délocalisation des procédures d’asile reflètent la persistance des frontières dans un monde globalisé.
Ce premier axe vise à rendre compte des dynamiques de construction des frontières et/ou des modalités de leurs reconfigurations. Les contributions sont invitées à se pencher sur les conditions d’émergence des frontières, qu’elles soient géographiques, sociales ou symboliques. Quels sont les acteurs, les logiques et les mécanismes à l’œuvre dans la construction des frontières ? Comment les frontières sont perçues ou parviennent à être reconnues en tant que telles par les acteurs sociaux ? Quels sont les ressources et les dispositifs mis en œuvre pour l’établissement, l’institutionnalisation ou le renforcement des frontières ? Quels sont les enjeux géopolitiques, économiques et sociaux liés à l’émergence de nouvelles frontières ou à leur reconfiguration ?
Passer les frontières ?
Qu’elles séparent des territoires géographiques, des catégories ou des groupes sociaux, la plupart des frontières peuvent être traversées. Cependant, les conditions de possibilité de ce passage doivent être interrogées. Qui est autorisé à traverser la frontière ? Selon quels critères et dans quel contexte ? Que fait ce passage des frontières aux personnes et aux choses ?
D’une part, cet axe permet d’interroger les modalités régissant le passage de frontières territoriales et étatiques, notamment à partir de l’histoire de la mise en place de passeports nationaux et de visas ou celle de l’exil (Diaz, Aprile, 2021). On pourra également s’intéresser aux contrôles aux frontières en prêtant attention aux critères d’autorisation de passage des personnes et des marchandises. Quel est le rôle joué par les politiques d’immigration dans les contrôles aux frontières ? Comment celles-ci évoluent-elles ? Les frontières nationales sont souvent des frontières linguistiques, on peut considérer la traduction de textes ou de paroles comme un acte de passage de frontières. Quels textes peuvent passer les frontières ? Qui juge qu’un texte est trop spécifique à un contexte national pour être traduit ? Que fait ce passage des frontières aux mots et aux idées ?
D’autre part, cet axe conduit également à interroger de façon plus symbolique le passage des frontières sociales (Pasquali, 2021), qu’on peut assimiler à la mobilité sociale des individus et des groupes. Les propositions d’article pourront s’intéresser spécifiquement à des phénomènes d’ascension sociale ou de déclassement (Peugny, 2009), en mettant en évidence les facteurs rendant possible un tel déplacement dans l’espace social. On attendra également des contributions d’être particulièrement attentives aux effets de cette mobilité sur les individus, leurs pratiques et leurs représentations. Que garde-t-on de son milieu d’origine en passant les frontières ? Que « coûte » ce passage ?
La question du passage des frontières concerne aussi d’autres types de frontières, comme les frontières de genre (Beaubatie, 2024), les frontières de race et les frontières entre handicap et validité. La question du « passing » dans la littérature étatsunienne désigne précisément, pour les Afro-Américains, le fait de « passer pour » des personnes blanches (Trépied, 2019). Ces personnes traversent donc cette frontière raciale supposée infranchissable. Dans quelles conditions ces passages sont-ils possibles ? Selon quelles caractéristiques des individus ou des groupes concernés ? La catégorisation d’un côté ou de l’autre de la frontière peut être dépendante du contexte. Dans le cas du handicap, certaines personnes peuvent ne pas se percevoir comme handicapées, mais demander une reconnaissance en tant que travailleurs handicapés pour obtenir l’adaptation de leur poste de travail (Bertrand, Caradec, Eideliman, 2014). Cela fait écho avec la distinction que propose Erving Goffman dans Stigmate (1975) entre les individus discrédités, dont le stigmate est immédiatement connu, et les individus discréditables, dont la différence n’est pas apparente et qui peuvent plus ou moins contrôler cette information – il s’agit par exemple de personnes porteuses d’un handicap invisible.
En retour, ces passages d’un côté à l’autre de la frontière signalent la porosité relative de ces frontières. Ont-ils une influence sur l’existence même d’une démarcation entre ces catégories symboliques ? Les possibilités de traverser les frontières remettent-elles en question l’existence même de ces dernières ?
Certaines personnes peuvent se positionner ou être positionnées à l’interface entre deux groupes, sur la frontière. Il s’agit par exemple des personnes dont la catégorisation en des termes raciaux ou genrés est difficile, comme certaines personnes métisses (Brun, 2024) ou non-binaires – cette ambiguïté étant la plupart du temps perçue comme dérangeante par l’observateur extérieur (West, Zimmerman, 2009). Néanmoins, ce positionnement sur la frontière n’est pas toujours perçu comme problématique. Dans la tradition des Sciences and Technology Studies (STS), le concept d’objet-frontière (Star, 2010) permet d’appréhender les interactions et la collaboration entre groupes issus de différentes disciplines scientifiques. On pourrait situer ces objets-frontières sur les frontières disciplinaires, comme des points de contact permettant une communication par-delà les frontières. Comment ces objets – qui peuvent ne pas être des objets matériels mais des concepts théoriques – deviennent-ils des objets-frontières ? Quel est effet de tels contacts sur l’existence même des frontières ?
Contester et déconstruire les frontières
Pour Pierre Bourdieu, « les frontières, même les plus formelles en apparence, […] fixent un état des luttes sociales. […] Les limites sont ici des frontières qu’il faut attaquer ou défendre de vive lutte et les systèmes de classement qui les fixent sont moins des instruments de connaissance que des instruments de pouvoir, subordonnés à des fonctions sociales et orientés, plus ou moins ouvertement, vers la satisfaction des intérêts d’un groupe » (Bourdieu, 1979, p. 555-556). Les frontières sont des objets de lutte. Si certains acteurs œuvrent à l’établissement de frontières rigides, d’autres contestent et agissent pour la déconstruction de ces dernières.
Certaines frontières territoriales, imposées à un moment donné, en sont venues à disparaître après un conflit ou des négociations. Les contributions pourront montrer comment certaines frontières ont été ou sont encore aujourd’hui contestées à travers le monde, en mettant en évidence les groupes sociaux en jeu et leurs intérêts divergents. A l’échelle du monde, certains chercheurs ont mis en évidence un processus de « déterritorialisation » des rapports de pouvoir (Cuttitta, 2007) : le pouvoir ne s’appuie plus nécessairement sur un référent national et s’affirme à travers des entités supranationales (ONG, institutions supra-étatiques, firmes multinationales, etc.). Les frontières étatiques perdent une partie de leur importance, sans toutefois disparaître. On assiste à une reconfiguration des frontières. La déconstruction des frontières nationales laisse place à d’autres types de frontières, notamment intra-nationales et/ou liées aux statuts des groupes considérés : les frontières symboliques et sociales semblent ainsi prendre le pas sur les frontières territoriales. Cette idée est cependant nuancée par l’actualité de ces dernières années qui voit la question de la frontière territoriale revenir sur le devant de la scène. Des frontières qui avaient fait l’objet d’accords il y a plusieurs années ont été contestées par la force. C’est notamment le cas des conflits qui opposent la Russie et l’Ukraine ou encore Israël et la bande de Gaza.
Les frontières symboliques (symbolic boundaries) sont définies comme des distinctions conceptuelles que les individus établissent et discutent, par contraste avec les frontières sociales (social boundaries) qui sont objectivées par l’accès inégal aux ressources qu’elles autorisent aux différents groupes sociaux (Lamont, Molnár, 2002). Les frontières symboliques sont ainsi plus souvent débattues dans leur localisation et semblent plus facilement contestables. Par exemple, Bourdieu considérait que la frontière séparant la sociologie et l’ethnologie n’était qu’une « fausse frontière », n’ayant « aucune espèce de justification logique » (Bourdieu, 2009, p. 30). Cela ne signifie pas pour autant que les frontières disciplinaires sont arbitraires : elles ont été constituées historiquement du fait de rapports de pouvoir au sein du monde académique (Cohen, 2021). En allant plus loin, on pourrait interroger les effets de l’émergence des « studies » (Cultural Studies, Postcolonial Studies, Gender Studies, etc.) à partir des années 1970 (Darbellay, 2014), et plus largement de l’interdisciplinarité, sur les disciplines scientifiques et les frontières qui les séparent (Heilbron, Bokobza, 2016). Les contributions pourront ainsi s’attacher à décrire les formes de contestation de toutes sortes de frontières, notamment disciplinaires ou scientifiques, et, en miroir des processus d’émergence de nouvelles frontières, les processus de disparition d’anciennes frontières.
Il conviendra toutefois de se demander s’il est possible que les frontières symboliques disparaissent totalement. Peuvent-elles être entièrement déconstruites sans qu’il n’en subsiste rien ? Lors du mouvement de décolonisation, les frontières des empires coloniaux ont-elles tout à fait disparu ? Pour développer cette réflexion, on pourra par exemple mobiliser le concept de « frontières fantômes » qui désigne les « traces laissées dans les sociétés contemporaines par des territorialités défuntes » (Von Hirschhausen, 2017). Imprévisibles, ces frontières peuvent apparaître sur des cartes qui mettent en évidence certains phénomènes sociaux (comme les résultats d’une élection spécifique) mais rester invisibles à d’autres moments. C’est par exemple le cas de l’ancienne frontière interallemande, qui continue d’être une ligne de démarcation importante (Lacquement, 2021), jusque dans la ville de Berlin (Hocquet, Garrido, Von Hirschhausen, 2017). S’il ne s’agit plus de frontières étatiques, si leur franchissement est facile, il reste que ces frontières perdurent sous une forme symbolique.
S’il n’y a plus officiellement de colonies aujourd’hui, la relation coloniale entre anciens colonisés et anciens colons semble persister et se manifester sous la forme de nouvelles frontières. En France, des frontières symboliques sont tracées dans les représentations à la fin du XXe siècle entre les anciens immigrés originaires des pays européens et les vagues d’immigration plus récentes, venues notamment des anciennes colonies – ces immigrés d’origine africaine étant jugés moins « assimilables » à la société française (Noiriel, 1988). Si les frontières étatiques ont perdu de l’importance, d’autres types de frontières les remplacent, des frontières symboliques internes à la société, qui sont des « limites entre catégories sociales racialisées héritées d’une double histoire de la colonisation et de l’immigration » (Fassin, 2012). Certains chercheurs ont cherché à dénaturaliser ces frontières en interrogeant notamment les critères d’obtention de la nationalité française, notamment raciaux et socio-culturels, qui cristallisent les représentations de cette identité et permettent de saisir son essentialisation (Hajjat, 2012). Les contributions pourront suivre cette voie et déconstruire scientifiquement ces frontières symboliques et sociales, afin de montrer qu’elles ont été historiquement et socialement construites.
Modalités de soumission
La revue Passerelles SHS est une revue pluridisciplinaire animée par des doctorant·e·s des Écoles doctorales « Sociétés, Temps, Territoires » (STT) et « Espaces, Sociétés, Civilisations » (ESC). Espace de réflexion ouvert sur une pluralité d’objets, de pratiques et de méthodes scientifiques, la revue Passerelles SHS promeut les dialogues entre disciplines des sciences humaines et sociales dans un esprit pluridisciplinaire.
Les propositions d’article seront composées d’une présentation de l’auteur·e (nom, discipline(s), statut, établissement(s), laboratoire(s) de rattachement et adresse électronique), d’un titre et d’un résumé d’environ 4 000 signes (espaces, notes et bibliographie compris), ainsi que l’axe de l’appel dans lequel elles s’inscrivent.
Les propositions d’article sont à envoyer avant le 14 mars 2025 au format .doc à passerellesshs@gmail.com ou à déposer sur la plateforme de soumission : https://ojs.univ-nantes.fr/index.php/pshs.
Comité de rédaction
- Julien Aubry, Nantes Université, CENS
- Alexandra Bachimont, Le Mans Université, TEMOS
- Mickael Berthier, Université d’Angers, TEMOS
- Emilie Caugant, Université Bretagne Sud, TEMOS
- Abdul Aziz Dembélé, Université Rennes 2, LiRIS
- Bastien Fayet, Université d’Angers, ESO
- Valentin Hamard, Université d’Angers, TEMOS
- Emersende Stéphan, Nantes Université, CENS
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Notes
[1] https://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/frontieres
[2] Ibid.